L'objet du délit.
Il fallait bien se rendre à l'évidence, les portes arrière de ma 2cv camionnette étaient corrodées autour du joint de vitre et les joints d'étanchéité en caoutchouc avaient disparu au fil de leurs 34 ans d'existence.
Le hasard m'a fait trouver un jeu de portières neuves à un prix défiant toute concurrence sur le Net.
Un monsieur débarrassait la cave de sa mère et vendait des anciennes pièces Citroën neuves, emballées au sec depuis une trentaine d'années.
Et voici les Pyrénées !
Il y avait un peu de route puisque cela se trouvait non loin de la frontière Espagnole, sur la route de LERIDA. Qu'à cela ne tienne, il faisait beau et j'avais réservé la journée à cette tâche. Par l'autoroute, même en prenant son temps c'était très faisable.
Kilomètre zéro : Je prends des outils, des pièces de rechange et de l'huile. Il est 09h30, çà devrait aller. Le soleil brille.
Km 15 : Zut, j'ai oublié de faire le plein.
Km 16 : Zut, j'ai oublié de retirer des sous.
Km 19 : Le tableau de contrôle 12 volts (fait maison) s'éteint. Plus d'alimentation arrière, plus de recharge GPS ni téléphone. Hé ben, on n'est pas arrivé.
Km 20 : Je m'arrête le long d'un bois, et par chance, la fautive n'était qu'une simple cosse qui avait décidé de reprendre sa liberté. La centrale 12 volts n'a rien ! Ouf. On repart.
Km 47 : Bouchons Toulousains résorbés, tout le monde est au travail, la traversée est une rigolade.
Km 60 : Un énorme carton sur la voie d'en face. Les voitures sont arrêtés sur près de 4 km. La radio 107.7 "Info Trafic" diffuse du Rn'b puis une interview d'un auteur de théâtre contemporain. Rien sur le carton et le ralentissement. Grace à la cibi, j'aviserai les routiers qui pensaient que c'étaient des travaux.
Je m'arrête sur une aire de repos pour enlever l'écran de calandre de Titine car il fait chaud. Elle va bien.
Un parigot sortant des chiottes critique mon sweat-shirt Citroën Sport (un authentique vêtement sortant de la boutique Citroën Rallye) alors que je roule en 2cv camionnette. Mon dieu que les gens peuvent être cons !
Vinci autoroutes recommande de surveiller sa pression des pneus, faudrait encore que le gonfleur disparu depuis des lustres soit remplacé.
Vinci autoroutes demande à ce qu'on lui signale les WC malpropres. C'est chose faite, ces toilettes sont ignobles.
Je vous ai épargné la photo des WC pour me contenter du lavabo...
Je trouverai même une fiole de popper's (authentique) sur la margelle d'une fenêtre casssée !
Km 140 : Un connard de Basque (pléonasme) limité à 80 (poids lourd) accélère dans la montée, de manière à m'empêcher de le doubler alors que je suis à plus de 90. Il montera à plus de 110 pour me lâcher et sera bien obligé de lever le pied dans la descente.
Il avait sûrement vu l'ane Catalan sur la lunette arrière et le logo de la Senyera. Je le doublerai dans la descente et lui passerai une engueulade en Espagnol à la cibi.
Pas de réponse. Euskadi = No cojones ! (intraduisible mais les hispanophones ont le droit de se marrer)…
Je le laisse prendre la direction de San Sebastian (Donostia). Bon vent !
Le Lauragais et le Comminges ont été traversés assez rapidement sans que je ne m'en aperçoive vraiment. Brave Titine.
Si j'avais le temps, je pourrais même sortir à Guzet-Neige mais bon... on n'est pas la pour çà !
On arrive maintenant dans le Val d'Aran et les paysages deviennent superbes.
Ah ! voici la sortie LERIDA (Espagne). Il va falloir la prendre mais je n'irai pas jusque LERIDA.
Km 156 : Petite halte à MONTREJEAU. A noter une mocheté de rotonde-parking en béton. Au milieu des Pyrénées, c'est coquin comme esthétique !
Halte à MONTREJEAU. Titine a bien mérité un peu de repos et je dois trouver quelque chose à manger avant la montagne.
J'ai remarqué la présence d'un couple de salopiots de rosbeefs en camping-car. Ces braves gens se sont installés durablement (voir les cales sous les roues) et déversent sans vergogne leurs eaux usées et leurs boues (on va dire comme çà), par la porte, face aux Pyrénées, en pleine ville de MONTREJEAU.
Bravo !
MONTREJEAU. Au-delà de ces montagnes, c'est l'Espagne et l'Aragon !
Sur la place principale de MONTREJEAU, découverte de la statue de monsieur Abeillé (qui a promulgué la IIIème République). Je ne connaissais pas mais je suis une burne en histoire.
Km 166 : Arriba España.
Mais auparavant, passage à St Plancard pour récupérer les portières. Je sens que l'épicerie va être facile à trouver parmi ces quelques maisons.
Un bled d'un autre âge où j'ai vu des octogénaires burinés (hommes et femmes) qui poussaient des brouettes sur la départementale, et un papy octogénaire juché sur un vélo aussi vieux que lui qui montait les cols assis sur son enclume rouillée !
Ils sont rustiques par ici. Je trouve l'épicerie à 12h40. Pas de chance, çà fermait à 12h30 pour rouvrir à 15h30.
Il ne reste plus qu'à poursuivre sur l'Espagne où j'ai un autre business à faire. Je ramènerai les portes au retour.
Km 214 : Vielha n'a pas changé.
Je trouverai même une timide Senyera au détour d'une route de montagne.
Théoriquement on est aux confins de la Catalogne, mais on est à deux pas de l'Aragon. Je ne trouverai d'ailleurs personne parlant Catalan et devrai me résoudre à parler Castillan…
Il est temps de revenir sur Saint Plancard, récupérer mes portières et rentrer rapidement car j'en ai vraiment assez. Titine ne se plaint pas mais la gazolina Ibérique à faible indice d'octane ne lui convient que moyennement et elle n'avance plus.
Je recompléterai le réservoir de retour à Montréjeau. Il fait beau, je me cale à presque 95 et la musique de radio "Info Trafic" n'est pas trop mal.
La première gare de péage. C'est reparti à casquer. Je suis frappé par l'automatisation des gares de péage. Vous avez dit chômage ?
Je pourrais me rendre en Andorre, faire un peu de contrebande mais je n'ai vraiment pas le temps.
Ah ben voilà, on est bien rentrés. Toulouse et ses bouchons sont au rendez-vous !
Je ne rentrerai hélas pas tout de suite à la maison. Je décide de passer voir les collègues puis quelques potes, ce qui me fera rentrer vers 2 heures du matin.
Maison !
Crevé mais heureux. Je suis intact, Titine aussi et elle n'a pas consommé une goutte d'huile malgré cette épreuve autoroutière et la galerie sur le toit. Par contre, elle a bu, la coquine. Elle n'est pas faite pour l'autoroute.
Voilà comment on fait 330 km dans la journée avec une 2cv camionnette, ce qui laisse le temps de penser sur l'autoroute.
J'ai fait l'ours des Pyrénées tout seul et j'ai bien réfléchi sur beaucoup de choses. Le reste de la soirée est inracontable.
Une journée simple, mais nécessaire, et puis il faisait beau. Ce week-end sera une autre paire de manches. En effet, j'ai école.
Retour à la réalité…