Le titre résume tout et cette interrogation est fort possible.
En quelques années, Les "Tuche" se sont imposés comme une saga à part dans le paysage de la comédie française. Avec leur ton décalé, leur univers de caricature, de stéréotypes et d'outrances absurdes, chaque film a réussi à rassembler des centaines de milliers puis des millions de spectateurs.
Pour Noël 2021, Les "Tuche 4" débarquent et s’attaquent à la casse sociale et aux GAFA, avec la troupe de comédiens bien connus et un nouveau venu : Michel Blanc, qui fait quelques ravages (qu'allait-il faire dans cette galère) ? Invité spécial : un pull de Noël.
Ben voilà… Pour Noël, les ricains font Venom et nous… les Tuche (!), avec monsieur Rouve qui nous traite de "fin de race". L'élite française vient de sortir un nouveau film, une sorte de franchise bâclée, mais de plus en plus politique, mâtinée de publicité pour la "française des jeux".
Ce quatrième volet de la saga Tuche était prêt depuis plus d'un an, mais Pathé a pris la décision radicale d'annuler la sortie initiale en fin 2020, et de ranger les "Tuche 4" dans un carton, jusqu'au Noël suivant, pour cause de crise sanitaire. Ce film porte en lui l'urgence dans laquelle il semble avoir été fabriqué.
Entre la famille Tuche et le public, on ne peut pas dire que ça ait été le coup de foudre immédiat. En 2011, le premier volet de cette franchise a attiré 1,5 million de spectateurs. C'est un score très enviable, mais pas le raz-de-marée attendu. En 2016, la suite a fait mieux, avec le triple de spectateurs (4,6 millions d'entrées), ce qui a installé les Tuche dans la culture (!) populaire française, et ce à tel point que le 3ème volet, a fait près de 5,7 millions d'entrée, en 2018.
On comprend mieux pourquoi Pathé a voulu assurer le coup, et reporté la sortie du volume 4, car les salles de cinéma étaient tenues, en 2020, de respecter des jauges strictes. Le succès de ces comédies "lourdes" à la française, genre cinéma social, ressemble à une anomalie. Leurs deux interprètes principaux, Isabelle Nanty et Jean-Paul Rouve, sont globalement appréciés mais c'est tout. La réalisation n'a rien d'époustouflant et le filon des gens modestes gagnant au loto a déjà été exploité dans un millier de comédies de boulevard ainsi que dans quelques autres navets plus ou moins réputés.
Si le cinéma populaire, s'agissant de comédies ou même de films romantiques, se tourne le plus souvent vers les milieux aisés, c'est juste que des personnages sans budget ne peuvent ni voyager à l'autre bout du monde, ni s'offrir des mariages somptueux, ni inviter leurs 3000 potes à passer le week-end dans leur résidence secondaire, ce qui n'est pas pratique quand on veut que le grand public oublie son quotidien.
Ce navet envoie du rêve en faisant gagner des millions d'euros à une famille de prolétaires, un peu comme les célèbres publicités de la française des jeux, quasiment passées dans le langage courant (au revoir, président) ou (c'est le jeu, ma pauv' Lucette).
L'humour bien gras de ce navet de Noël repose sur que fait que ces malheureux Tuche (vous ?) ne maîtrisent pas les codes des riches. Incapables de les assimiler, les Tuche font ce qui leur passe par la tête. Le réalisateur a peut-être pensé à une aventure rafraîchissante qui permet au spectateur d'oublier les fins de mois difficiles et la pandémie, au moins temporairement, en vivant un rêve de beauf par procuration.
Ces gags bien bien lourds se veulent accessibles à tous, mais les mécanismes comiques usés jusqu'à la corde depuis sont réutilisés encore et encore. Les auteurs font dire n'importe quoi aux personnages, et enchaînent les jeux de mots plus que pourris. Le personnage joué par Michel Blanc (Marteau) peine à finir un film d'une centaine de minutes, mais une certaine conscience politique a gagné l'univers tuchesque aux faibles neurones. Mépris de classe ? Je n'ai pas réussi à le cerner, tant le film part dans tous les sens, se moquant de ses propres personnages, mais critiquant aussi le progrès avec les éternelles vannes sur les pauvres, sur fond de pommes de terre et d'alcool. Se voulant moraliste (l'homosexualité finit par ne même plus être un sujet), l'approche de la valeur travail reste assez floue, avec des railleries sur ces "salauds de pauvres" et des propos anticapitalistes (le méchant Magazone).
Le public rêve de gentillesse, de bienveillance et de retour aux choses simples, mais ces Tuches là, en attendant la saison 5 déjà annoncée, restent une redoutable machine à billets, même si jusqu'ici tout va bien, et que les ""Tuche 4"" sont un des pires cadeaux de Noël de la décennie…
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